Cannabidiol (CBD)
le point sur la législation
Le 19 novembre 2020, la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) a rendu son arrêt dans l’affaire C-663/18, dite Kanavape.
La Cour était saisie d’une question préjudicielle par la Cour d’Appel d’Aix en Provence portant sur la conformité au droit de l’Union européenne de l’article 1er de l’arrêté du 22 août 1990 qui limite la culture, l’importation et l’utilisation industrielle et commerciale du chanvre aux seules fibres et graines de la plante et interdit de ce fait l’importation et la commercialisation d’e-liquide pour cigarette électronique contenant de l’huile de cannabidiol (CBD) obtenue à partir de plantes entières de chanvre.
Il est à noter que le mécanisme de la question préjudicielle permet à une juridiction nationale de demander à la CJUE d’interpréter le droit de l’Union. Il appartient ensuite à la juridiction nationale de résoudre le litige conformément à l’arrêt de la CJUE.
Dans cet arrêt, la CJUE considère qu’en l’état des connaissances scientifiques et sur la base des conventions internationales en vigueur, l’huile de CBD ne constitue pas un produit stupéfiant. Elle en déduit que les dispositions relatives à la libre circulation des marchandises sont applicables à ce produit et qu’une mesure nationale qui interdit la commercialisation du CBD issue de la plante entière constitue une entrave à la libre circulation.
Elle précise cependant qu’une telle mesure peut être justifiée par un objectif de protection de la santé publique sous réserve qu’elle soit nécessaire et proportionnée.
Elle rappelle ensuite qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier, à la lumière des données scientifiques disponibles, si des effets nocifs pour la santé humaine pourraient être liés à l’utilisation du CBD, justifiant l’application d’un principe de précaution et si les mesures prises sont propres à garantir l’objectif de protection de la santé publique.
En l’espèce, et afin de guider la juridiction dans son appréciation, la CJUE souligne que la réglementation française ne lui parait pas remplir cette condition dans la mesure où l’interdiction de commercialisation ne frappe pas le CBD de synthèse qui aurait les mêmes propriétés que le CBD naturel.
Les autorités françaises prennent acte de cet arrêt. Elles tiennent à souligner que, dans cet arrêt, la CJUE reconnait que l'application du principe de précaution pourrait, sous réserve d’éléments scientifiques probants, justifier une réglementation restreignant la commercialisation des produits à base de CBD. Elles étudient les voies et moyens pour prendre en compte ses conclusions.
Les autorités réitèrent d’ores et déjà leurs avertissements concernant les effets potentiellement nocifs de la molécule de CBD, encore peu connue. Elles signalent en outre les risques sanitaires liés au Δ-9-tétrahydrocannabinol (THC), molécule classée comme stupéfiant, que sont susceptibles de contenir les produits issus du chanvre. Elles appellent à la plus grande vigilance concernant les modes de consommation de ces produits, notamment la voie fumée, dont la toxicité est avérée.
Par ailleurs, il est rappelé que les produits contenant du CBD demeurent soumis au respect des dispositions législatives françaises, et plus particulièrement des suivantes :
Ils ne peuvent, sous peine de sanctions pénales, revendiquer des allégations thérapeutiques, à moins qu’ils n’aient été autorisés comme médicament par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou la Commission européenne sur la base d’un dossier évalué selon des critères scientifiques de qualité, sécurité et efficacité.
Les publicités en faveur de produits contenant du CBD ne doivent pas entretenir de confusion entre le cannabis et le CBD et faire ainsi la promotion du cannabis. Cette pratique est susceptible de constituer l’infraction pénale de provocation à l’usage de stupéfiant.
Enfin, les autorités françaises estiment que l’élaboration d’une approche commune européenne des produits à base de CBD serait souhaitable. Elles poursuivent à cet égard leurs échanges avec les autres Etats membres et la Commission européenne
Décision de la Cour de Cassation du 23 Juin 2021
Pour la Cour de cassation, tout CBD légalement produit dans l’UE peut être vendu en France
Moins de flou juridique. Dans son arrêt, la plus haute juridiction judiciaire explique qu’en vertu de la libre circulation des marchandises au sein de l’Union européenne (UE), on ne peut interdire la commercialisation du CBD, la molécule non psychotrope du cannabis, dans un Etat membre si ce produit est produit légalement dans un autre Etat membre. Or cette question reste en suspens car les juges de la cour d’appel de Grenoble « n’ont pas recherché, alors que cela leur était demandé, si le CBD découvert dans le magasin tenu par le prévenu était fabriqué légalement dans un autre Etat de l’UE », explique-t-elle.
La Cour de cassation précise que dans cette affaire, elle ne tranchait pas la question de fond de savoir « si la France peut valablement ou non se prévaloir de l’objectif de protection de la santé publique pour interdire la détention et la commercialisation de CBD sur son territoire ».
Loi en cours de réécriture
Yann Bisiou, président de l’association L630 spécialisée dans le droit des drogues, estimait que cette décision signait « la fin de l’étranglement économique des boutiques », qui coulaient souvent à cause du manque à gagner provoqué par les fermetures temporaires prononcées à leur encontre. Désormais, « il faut que la justice puisse prouver que le CBD a été produit de manière illicite pour justifier une fermeture », a observé le juriste. « Et pour cela, un simple test sur le taux de THC ne peut pas suffire, l’expertise est très compliquée et quasiment irréalisable.
La France est actuellement en pleine réécriture de la réglementation encadrant le CBD - la molécule non psychotrope du cannabis - après avoir été priée par la justice européenne de revoir sa copie. En novembre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait jugé illégale l’interdiction de la vente de CBD en France au nom de la libre circulation des marchandises.
La future règle prévoit que « l’autorisation de culture, d’importation, d’exportation et d’utilisation industrielles et commerciales du chanvre » soit « étendue à toutes les parties de la plante », sous réserve que sa teneur en THC - la molécule psychotrope du cannabis - ainsi que celle des produits finis, soit inférieure à 0,2 %
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